Iéna à la conquête de Paris
Par Béatrice Majewski, journaliste
J’ai toujours vécu à Paris, je suis une cani-parisienne depuis que j’ai 5 mois ! C’est mon univers, ma ville, mon quotidien. Je m’y sens bien et j’aime m’y promener avec ma maîtresse. Ensemble, nous faisons des kilomètres. Dans mon quartier, je connais tous les circuits de balades imaginés par ma maîtresse ! Bien sûr, mes pattes foulent plus souvent le goudron que la terre ou l’herbe verte, mais comme je n’ai pas droit d’accéder ni aux parcs ni aux squares, j’ai dû m’habituer. Pour me donner l’illusion d’y entrer, et d’humer toutes les odeurs qui s’en échappent, ma maîtresse me fait faire le tour de certains squares. Le long du mur, ce n’est pas la même chose, mais je m’en contente. Et puis, il y a aussi nos balades quotidiennes au Champ de Mars. Ah ! le Champ de Mars, la Tour Eiffel illuminée… J’adore m’y promener car c’est l’un des seuls parc ouvert dans la capitale où je peux être sans laisse ! Enfin… sans laisse, juste sur les allées cavalières et quand la police municipale ne patrouille pas ! Et surtout, pas de pattes sur les parterres d’herbe ! Les policiers à vélo veillent ! On ne sait jamais, nous les chiens, nous sommes tellement sales, que nous pourrions laisser sur les pelouses nos restes de pique-niques, nos bouteilles de bières brisées, nos déchets made in McDo… c’est vrai que ça ferait mauvais effet ! Alors, pour que les pelouses restent propres, on nous interdit les zones herbeuses, même pour jouer à la balle ! Bon, je fais avec… Heureusement qu’il y a de l’espace, au moins je peux faire des parties de balles endiablées avec ma maîtresse !
Vivre à Paris c’est aussi faire de belles balades sur les quais de Seine. J’aime longer les péniches, parfois j’aimerais monter sur l’une d’elles. Mais ma maîtresse refuse toujours. Pourtant, je les connais toutes ! Certains chiens y habitent, j’y ai même vu des chats se prélasser au soleil. J’ai bien noté l’endroit et quand nous repassons devant, je tire toujours sur ma laisse en espérant en voir un…
Dans les rues parisiennes, j’adore piquer quelques sprints pour attraper les pigeons. Ils se dandinent avec leur gros ventre et j’ai trop envie de les capturer. Parfois je saute quand ils s’envolent pour essayer de les attraper… mais sans succès ! De toute façon, je n’ai droit aux sprints uniquement s’il n’y a personne sur le trottoir, car il paraît que cela fait peur aux gens… un chien qui court après des pigeons ! Quand je jappe aussi, je vois bien que les Parisiens sont impressionnés! Malgré le bruit infernal dans les rues parisiennes, mes jappements les font sursauter ?! Je vois bien dans leurs regards qu’ils sont paniqués et qu’ils se disent : « Mon dieu, un chien, ici à Paris et en plus il jappe ! Mais il va nous sauter dessus ! » Parfois, je n’ai même pas besoin de japper, pour voir leur mépris. Le seul fait d’être en laisse aux côtés de ma maîtresse déclenche des comportements inexpliqués. Comme ces parents qui se penchent, arc-boutés sur leur poussette pour cacher leur enfant. Ils pensent quoi ? Que je vais me jeter sur leur bébé pour le manger ??? J’aimerais leur dire que ma maîtresse me nourrit très bien, merci ! Dans un autre genre, il y a ceux qui attendent, quand je fais mes besoins et qui regardent ma maîtresse d’un air méchant juste pour voir si elle va ramasser… Et puis, il y a aussi les paroles agressives à mon égard et envers ma maîtresse : « Ah ces chiens, c’est sale ». J’ai même eu droit une fois dans mon immeuble alors que nous rentrions de balade à un « Mais ? C’est quoi ça ? ». Que répondre à de tels propos ? Parlementer, s’énerver ne sert à rien, certains ont l’esprit trop étriqué pour que je m’intéresse à eux! Alors nous partons, avec ma maîtresse, l’allure fière sans un regard pour ces mécréants.
Heureusement, nous faisons parfois de jolies rencontres. Des Parisiens sympas, qui me trouvent belle, qui ont envie de me caresser, de connaître mon âge, ma race. Alors j’en profite et je me laisse faire ! Même rare, je trouve ces petits échanges et ces rapprochements urbains improvisés très sympa. Les enfants aussi me font parfois rire ! En général, je ne fais pas trop attention à eux, mais certains me prennent pour un loup ! Peut-être à cause de mon pelage noir et feu et mon long museau ! D’autres s’amusent à passer une main sur mon dos quand ils me croisent. Ces caresses brèves et impromptues m’amusent ! Et puis, il y a aussi mes congénères. Quand je croise mes copains, quelle joie de les voir ! Nous entamons des petites danses d’approche, des petits jeux… mais avec nos laisses ce n’est pas toujours évident. Avec les chiens que j’apprécie moins, c’est autre chose… Je grogne un peu, montre les dents, mais je sais me tenir ! Et puis ma maîtresse est là pour me rappeler à l’ordre…
Voilà ma vie parisienne ! A deux pas du pont d’Iéna et de la station du même nom, je ne pourrais pas être mieux loti ! Même si les chiens ont du mal à se faire une place, Paris, c’est aussi ma ville !