Chiens en ville au Conseil de Paris
par Marie-Charlotte Belle et Delila Barthlen (Association : Chiens en ville)
Février 2013 : Le conseil de Paris
Au premier rang du balcon réservé aux visiteurs, nous avons une belle vue sur l’hémicycle de la Mairie de Paris. Enfin au bout de trois ans de nombreuses tentatives, un élu a accepté de porter notre projet de création des espaces canins à Paris. M. Jean-Jacques Giannesini, élu du 19ème arrondissement, présente devant le conseil de Paris le vœu de création à titre expérimental de deux espaces de liberté pour les chiens dans le parc des Buttes Chaumont.
La séance commence peu après 9h. Certains conseillers sont penchés studieusement sur leurs documents. D’autres lisent leur journal, envoient des textos ou bavardent entre eux. Beaucoup de sièges sont vides. Il est 10h30 et M. Giannesini prend la parole. Il a une minute pour convaincre ! D’un débit clair et rapide il explique que des espaces de ce type existent partout dans le monde et dans certaines villes en France (toutes tendances politiques confondues). A Paris, en revanche, les chiens sont autorisés dans peu de parcs et uniquement s’ils sont tenus en laisse. Il rappelle que “la présence animale en ville est source de lien social plus que jamais indispensable, notamment s’agissant des personnes isolées et vulnérables”. L’expérimentation serait utile pour l’éducation à la propreté des propriétaires de chiens et permettrait de mettre en place le compostage de déjections canines.
On entend quelques applaudissements.
Delila Barthlen, Marie-Charlotte Belle et Jean-Jacques Giannesini
Mme Fabienne Giboudeaux, Adjointe au Maire de Paris chargée des espaces verts et de l’environnement, répond à M. Giannesini. La Direction des espaces verts et de l’environnement (DEVE) aurait engagé une réflexion sur la création d’un tel espace pour chiens aux Buttes Chaumont. Mais ses premières conclusions ne sont guère encourageantes. Mme Giboudeaux met en avant les problèmes que cela pourrait engendrer, notamment des problèmes de sécurité (les chiens évoluent en liberté) et de propreté (forte concentration des chiens). Elle souligne qu’il est délicat de “privatiser un tel espace pour le seul bénéfice des chiens” en exprimant également des doutes quant au compost, vu que les déjections canines peuvent contenir des polluants (antibiotiques, phosphates, germes pathogènes) dus aux traitements médicamenteux. Enfin, elle demande à M. Giannesini de retirer le vœu afin d’attendre les résultats des groupes de réflexion chargés d’examiner l’évolution des usages du parc.
Alors qu’il est d’usage de passer au
vote (ce que le président de la séance ne manquera pas de rappeler), M. Giannesini tient à répondre aux arguments avancés par Mme Giboudeaux. Les problèmes évoqués n’existent pas dans les villes et pays où il y a des espaces canins. Il ne retire pas le vœu justement pour qu’il soit pris en compte lors de la prochaine rénovation des Buttes Chaumont.Dernière étape de la vie d’un vœu présenté dans l’hémicycle: le passage au vote. Le vœu est malheureusement repoussé. Toutefois, M. Giannesini convaincu du bien-fondé de notre demande, prévoit de réitérer le vœu lors d’autres séances pour se rappeler au bon souvenir du projet de rénovation des Buttes Chaumont et a l’intention d’insérer le projet dans son programme électoral du 19ème arr. et de le défendre auprès de sa candidate à la Mairie de Paris.
C’est un premier pas et nous espérons que bientôt d’autres conseillers et maires comprendront qu’il est nécessaire et urgent de créer des espaces de liberté pour chiens dans nos villes si déshumanisées.
* Lire le vœu de M.Giannesini dans son intégralité
Le Parc des Buttes Chaumont
Réponse du comité OKA à Madame Fabienne Giboudeaux
Adjointe au maire de Paris, chargée des espaces verts et de la biodiversité
Vous semblez inquiète pour la sécurité puisque les chiens pourraient évoluer en liberté. Mais n’est-ce pas justement le principe d’un parc canin, un lieu clos où les chiens peuvent gambader, jouer avec leurs propriétaires sans mettre qui que ce soit en péril. Si vous parlez de sécurité c’est actuellement l’inverse qui se produit ! Des chiens sans laisse, les gardiens et jardiniers des parcs et jardins en côtoient tous les jours. Et ils vous diront que de nombreux maîtres lâchent leurs chiens dans les allées, non par désobéissance ou incivilité prononcée mais simplement pour offrir un moment de liberté à leurs compagnons. La réalité est là !
Pourquoi ce qui est si simple ailleurs, devient toujours si compliqué à Paris. Dans d’autres grandes capitales, les exemples sont nombreux : Londres, Bruxelles, Berlin, Helsinski, New York. Et en France des métropoles comme Grenoble, Toulouse ont pensé à intégrer le vivant en ville. A Lyon, le parc de la Tête d’Or a deux espaces canin et dans les autres allées les chiens sont tenus en laisse puisqu’ils ont leur endroit à eux. A Issy les Moulineaux, la municipalité a ouvert deux espaces de liberté dans le parc de l’Ile st germain qui font la joie de nombreux propriétaires.
Alors comment aux Buttes-Chaumont dans ce parc de près de 25 hectares, un des plus grands de Paris ne pas trouver plusieurs centaines de mètres carrés pour répondre aux besoins des chiens citadins? Les joggers y sont de plus en plus nombreux, va t-on leur demander d’arrêter de courir sous prétexte que le parc n’est pas un lieu d’entraînement et qu’ils risquent de heurter une poussette ou une personne âgée ! Et à ceux qui l’été se prélassent sur les pelouses de ne pas confondre le parc avec Paris-plage et une poubelle géante ! Il est urgent d’apprendre à vivre ensemble. Et le vivre ensemble ne peut mettre de côté la nature, les animaux de compagnie et leurs maîtres.
Pourquoi ne pas profiter des rénovations en cours pour oser réaliser l’expérience de cani-parc et nous laisser propriétaires de chiens vous prouver que tout le monde peut y gagner. Concernant le compostage nous ne pouvons plus passer notre temps à fermer les yeux sur ce qui marche ailleurs, les québécois l’ont prouvé et depuis plusieurs années, le compostage canin pour la nature est totalement viable.
Il n’y a pas de sous-citoyen rappelait récemment la première dame de France et les propriétaires de chiens en prennent acte. Et, il faut que vous sachiez, Madame Giboudeaux, qu’ils sont nombreux à vouloir faire entendre leurs voix et à porter ce projet d’espaces de liberté pour chiens.
Le premier parc canin à Saguenay au Québec, succès commenté par le maire