« Dog Médecine » de Julie Barton
Comment mon chien m’a sauvée de la dépression (éditions Belfond)
par Christine d’Hauthuille – Coordinatrice du Comité OKA
Julie a 22 ans et à l’âge où tous les rêves sont permis, elle s’effondre sans crier gare sur le carrelage de cuisine. Inerte, juste le temps d’appeler sa mère à l’aide. Elle va quitter New York, laissant derrière elle une ville bruyante, bouillonnante, fatigante et un amour qui n’en n’est pas moins. Sans mot dire, elle rejoindra la maison familiale mettant enfin un diagnostic à ses douleurs et à ses souffrances : dépression. Un mal de vivre si grand, un désespoir si profond que l’idée même de s’éveiller et de sortir du lit lui paraît insurmontable : « Le sommeil était devenu une échappatoire si précieuse. En sombrant dans les ténèbres, j’ai fait le vœu distinct et pressant de pouvoir dormir pour l’éternité. » Et dans sa tête tout revient en boucle, les souvenirs de son enfance, l’hyper violence de son frère, une mère taisante et un père absorbé par son travail. Julie se questionne aussi sur sa vie privée : pourquoi n’est t-elle attirée que par des « Bads boys » ? Sans compter la petite voix dans sa tête qui n’arrête pas de lui murmurer des vacheries à tout va: « T’es moche, bête, tu ne sers à rien ni à personne ! ». Une constante dévalorisation d’elle-même, un manque de confiance totale. Une maladie perfide et sournoise qui préfère se nourrir de tristesse et d’idées noires, plutôt que de joie et d’optimisme.
Julie a passé toute son enfance aux côtés des chiens, « Les animaux me comprenaient, j’avais des alliés ». Elle reconnaît le réconfort immense qu’ils lui ont apporté. C’est quand elle se sent au plus profond du désespoir qu’elle prononce le désir d’avoir un chiot, un chiot rien que pour elle. Une envie qui ne la quitte plus et qui se confirme quand elle croise le regard de « Bunker ». C’est une certitude, dans ce monde si turbulent de la vie, ils ont un bout de chemin à faire ensemble. Julie va se transformer : « Je ne craignais pas de me lier intimement avec ce chien car je savais sa loyauté sans faille. L’amour qu’il me portait ne faiblirait jamais. D’un frétillement de queue, Bunker pourrait toujours me rappeler sa passion débordante pour la vie ».
Elle se sent responsable de ce petit être qui ne la juge pas, qui est toujours en joie et qui lui remplit les yeux de sourire : « Pour lui l’angoisse et l’inquiétude n’existaient pas. Seul importait l’instant. La joie. Je commençais à me dire que je devrais essayer de l’imiter. »
Une merveilleuse et délicieuse complicité va les lier, chacun apprenant de l’autre avec un amour inconditionnel comme pacte tacite. « Bunker » sait écouter Julie en lui redonnant confiance, il lui devient une présence
« aussi indispensable que l’oxygène ».
Si la majorité de nos dysfonctionnements proviennent de notre enfance, « Dog médecine » est encore une preuve que toute violence familiale laisse des traces indélébiles. Julie nous partage un témoignage poignant, bouleversant et sans concession. Elle transmet avec justesse ses états d’âmes, des maux d’âmes que la vie transforme en cauchemar permanent : « Je n’arrive pas à exister » résume la jeune femme. Si Julie avoue pendant sa maladie avoir eu du mal à parler, sur papier elle décrit avec des mots justes et poétiques son mal de vivre. Sa relation avec « Bunker » devient un arc en ciel aux multiples couleurs. Des mots si bien choisis que seule la véracité des émotions vécues peut inspirer : « J’étais en sécurité avec ce chien, et l’effet immédiat de cette prise de conscience a été que le désespoir et les ténèbres s’évanouissent comme des bulles de savon.»
Tout propriétaire canin un peu attentif reconnaît le bien ou le mieux-être qu’apporte la présence d’un chien à ses côtés. Un animal vit en permanence dans l’instant présent. Le chien sait égayer nos vies et nous manifester une gratitude permanente. Des témoignages ressemblant à celui de Julie, nous en avons entendu plusieurs à « Mon chien, ma ville ». Je me souviens de Marius et son accent du Sud, c’était un marin et la vie lui en avait fait voir. A la retraite cet homme seul avait trouvé son double canin en compagnie d’un fox. Plus récemment à Paris, une promeneuse de York, se confie : « On n’avait jamais eu de chien et ça peut paraître fou mais il a sauvé ma fille, il l’a aidé à sortir de sa dépression. Et c’est à toute la famille qu’il a donné son amour ». Je me souviens de cette femme, sa voix tremblait quand elle évoquait la souffrance de sa fille, sa voix vibrait aussi de reconnaissance et de gratitude à l’égard de ce nouveau compagnon familial.
Si les chiens peuvent nous aider à nous soigner, nos amis les chats ne sont pas reste. Iris Grace est devenu un phénomène en Grande Bretagne, à 8 ans les tableaux de cette jeune autiste sont déjà prisés par les collectionneurs. L’arrivée en 2014 de « Thula » va changer sa vie, le « maine coon » a le pouvoir mystérieux de calmer les angoisses de l’enfant. « Thula , l’aide à dépasser ses peurs et mieux gérer ses émotions. C’est le seul être qu’elle accepte tout le temps auprès d’elle » (Iris Grace. La petite fille qui s’ouvrit au monde grâce à un chat. Par Arabella Carter Jonhson – édit Presses de la Cité).
Des animaux qui savent nous donner le meilleur d’eux-mêmes. « Dog médecine », un livre qui nous rappelle que quoi qu’il arrive la vie est tellement plus douce et plus joyeuse en compagnie des chiens. Et comme conclue si bien Julie :
« J’avais trouvé un remède canin. Et je l’ai avalé d’une traite ».